Le Comité national d'éthique demande à l'Inserm de s'ouvrir à la réalité.
L’avis n° 95 du Comité Consultatif National d’Ethique pour les Sciences de la Vie et de la Santé du 11 janvier dernier renvoie l’INSERM à ses errements dogmatiques et unidimensionnels passés. Intitulé « Problèmes éthiques posés par des démarches de prédiction fondées sur la détection de troubles précoces du comportement chez l'enfant », ce document est révélateur de la pensée unique et incestueuse du monde médical.
Les reproches qui ont été faits à l’expertise collective de l’Inserm sont transposables aux sacro-saintes recommandations de l’AFSSAPS de bonnes pratiques ‘medicales et non médicales’ d’aide à l’arrêt du tabac (28 mai 2003).
Nous suspectons ces références de pratique de faire la part belle à ce que la médecine croit comprendre en évacuant, comme ‘charlatanisme de pacotille’, tout ce qu’elle ne peut pas apprécier faute d'instrumentation méthodologique et scientifique ad hoc. On peut évidemment questionner de la légitimité de la médecine à apprécier ce qui ne relève pas de la médecine et donc de ses compétences…
La liste des participants à cette recommandation est éclairante : sur la centaine de noms, dont on ignore les éventuels conflits d’intérêts éventuels avec l’industrie, seuls 6 ne sont pas ‘docteurs’ en médecine ou pharmacie. La psychologie ? C’est pas ‘scientifiquement mesurable’ selon la médecine basée sur les preuves : exit. Les Sciences de l’Education, même si redevenir non fumeur résulte à l’évidence d’un apprentissage psycho-cognitif ? Exeunt. Les praticiens privés : oh non, vous n’y pensez pas ! La dimension psychologique du tabagisme est ignorée.
Ces recommandations qui s’imposent aux professionnels de Santé doivent être revues par un comité indépendant (notamment des intérêts de l’industrie pharmaceutique) et examinant ce qui se passe sur le terrain et pas seulement dans les locaux discrets de laboratoires publics ou privés. On aurait un autre avis alors, plus dans l’intérêt des patients que des tenants du système hospitalo-universitaire. Espérons que la Haute Autorité de Santé s'en empare ... en toute transparence.
Pour revenir sur notre expertise ‘scientifique’ de l’INSERM, citons ainsi le paragraphe 6 concernant le choix consanguin des experts :
« La sélection des experts, la formulation des questions qui leur sont posées, et les méthodes auxquelles ils recourent ne sont pas sans incidence sur la nature de leurs conclusions. En l’occurrence, on peut regretter, comme l’ont d’ailleurs déjà fait des membres de l’Inserm lors d'un colloque sur « le trouble des conduites » organisé par l’institut le 14 novembre 2006, le choix d’un groupe d’experts représentant presque tous la seule interface de la biologie et de la psychiatrie.
« Or la problématique comporte des enjeux multiples et des dimensions à la fois scientifiques, médicales, humaines, psychologiques et sociologiques. Aborder des thèmes aussi complexes que les « attitudes déviantes », « égoïstes » ou « attentatoires aux droits d’autrui » requiert des outils d’interprétation adaptés et le concours de psychologues et de spécialistes des sciences humaines et sociales. Or le groupe d’experts choisi n’était pas représentatif de cette exigence pluridisciplinaire.
« Ces considérations, qu’a déjà développées le Comité d’éthique de l’Inserm, ne concernent évidemment pas le seul rapport visé par la présente saisine ; elles s’appliquent très généralement à toutes les expertises collectives portant sur des sujets de société. »
L'addiction tabagique est bien un sujet de société. A signaler aussi cette observation (p. 4) :
« Le CCNE redit ici son opposition à une médecine qui serait utilisée pour protéger la société davantage que les personnes. »
Nous y reviendrons dans un prochain billet, au sujet des arguments évoqués pour lutter contre le tabagisme passif et largement manipulés. Stop à cette instrumentation totalitaire de la médecine.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.