L’association DNF publie le 16
juillet dernier le témoignage d’un fumeur (J. Berthemin) concernant son sevrage
à l’aide de Champix° :
« tellement d'effets indésirables, j'y suis arrivé, je suis fier de moi mais à quel prix ; Cela serai à refaire ??????????? »
Très intéressante est la ‘réponse’ de DNF à ces points d’interrogations en surnombre, sous la plume de GA (Gérard Audureau), son président :
« Toutes les aides sont bonnes pour s'arrêter, seule, par contre, le désir de s'arrêter permet d'envisager avec sérénité un sevrage définitif. »
Pas étonnant que l’auteur du
témoignage ait jugé cette ‘réponse’ non satisfaisante : tentons - au-delà
d’une écriture grammaticalement incorrecte - de décrypter pourquoi et de proposer un conseil plus sûr.
[Suite...]
Une première analyse superficielle révèle que GA se moque de M. Berthemin : son ‘désir de s’arrêter’ n’aurait pas été présent, puisque seul il permet d’envisager un sevrage serein et que cela n’a pas été le cas. Quand on vient de passer quatre mois d’enfer dont trois mois sous Champix, il est certes difficile d’accepter que l’on vous affirme que votre ‘désir d’arrêter’ était bidon !
J’ai tendance à penser que la volonté M. Berthemin était bien manifeste. Est-ce que cette volonté est assimilable à un ‘désir’ ? Bien évidemment : non. La volonté relève de la décision consciente, le désir est une production de l’inconscient. M. Berthemin aurait eu la volonté de cesser de fumer, mais pas un vrai ‘désir’ de le faire. Possible, certains cessent de fumer pour des raisons externes, liées à la santé, à l’entourage … ou aux interdictions diverses de consommer dans les lieux publics.
On peut ainsi estimer que les interdictions de fumer, qui mettent la pression sur les fumeurs, contribuent à augmenter leur stress lors de l’arrêt. La position de DNF - rejeter la difficulté de l’arrêt à un manque de désir - est alors hypocrite : elle a activement contribué à ces réductions de liberté. Passons.
Quand on a quelque bagage en psychologie, cette discipline née de la découverte du désir humain, on sait que le désir ne peut être évoqué de façon négative. Le désir de s’arrêter, formulé ainsi, n’a pas de sens ni d’existence possible. Seul peut exister le désir de redevenir définitivement non fumeur. Il ne s’agit pas de jouer avec les mots ici, au sens traditionnel. Lacan affirmait que l’inconscient est structuré comme un langage ; et dans la langue de l’inconscient, la négation n’existe pas. On ne peut pas désirer quelque chose formulé négativement. Un enfant peut avoir le désir d’être grand, mais pas celui de ne pas rester petit : ce n'est pas la même chose, à moins de confondre désir et peur.
La solution est alors de trouver une formulation positive à ce prétendu ‘désir d’arrêter’. Nous évitons ainsi – comme la peste – cette notion de ‘sevrage’, connotée négativement car évoquant un manque de produit. Toutes ces formulations négatives augmentent la pression mentale de l’absence du produit, et des sensations de manque qu’il induit rapidement. Elles sont donc contre-productives.
Dans notre accompagnement des fumeurs lors de leur affranchissement nous les incitons à découvrir les raisons positives de leur arrêt. M. Berthemin en cite deux dans son témoignage :
- la fierté d’avoir réussi et
- la réduction de certains problèmes de santé.
En fait, seule le première est vraiment positive et durable. La deuxième, traditionnellement mise en avant par les thuriféraires de notre santé, n’est pas utile, quand bien même elle serait sincèrement vraie. Ceci sera l’objet d’un futur billet : il est avantageux de l’ignorer.
Quant à l’affirmation selon laquelle « Toutes les aides sont bonnes pour s'arrêter », je vous laisse le soin de juger de la valeur d’une telle généralisation en commentaires. Toutes les aides sont bonnes pour s'arrêter, quand elles ont marché ! Malheureusement cela n’est le cas que dans une petite minorité de tentatives. Soyons sérieux et cessons de prendre les fumeurs pour des gogos avec de telles lapalissades.
Bravo pour votre blog anti-tabac,un drame dans la famille d'une de mes petites patientes que je décris dans un livre sur le tabagisme féminin m'avait amené dès 1975 à présenter en salle d'attente un, puis deux, puis finalement 5 press-books remplis d'articles sur les méfaits du tabac. Encore bravo pour votre action
Rédigé par : alain. | 03/08/2007 à 16:54
Très intéressant.
Rédigé par : pikipoki | 05/08/2007 à 21:58