Pfizer France soutient quatre associations respectables sur son site internet prevention-tabac.com
- Le Comité National contre les Maladies Respiratoires
- La Fédération Française de Cardiologie
- La Fédération Française de Pneumologie
- La Société Française de Tabacologie
Ainsi le laboratoire Pfizer soutient les associations de bénévoles dont les dirigeants cautionnent en retour la promotion des produits médicamenteux. La médecine et la pharmacie évoluent en symbiose. Pourquoi pas, si c'est fait de façon transparente : cela présente des avantages.
Par contre quand les bénéficiaires de la générosité des donateurs cachent leurs liens d'intérêt et jurent leurs grands dieux qu'ils gardent leur indépendance de pensée et d'action, cela devient plus contestable. Ils se trompent et vous trompent et le dernier numéro du prestigieux British Medical Journal* (en anglais) le démontre à satiété.
La France n'a pas développé une grande culture éthique, comme les pays anglo-saxons empreints de la rigueur protestante. Les scandales et compromissions au plus haut niveau sont assez facilement compris, voire acceptés avec fatalité par le public. A ceci près qu'ici, le public est directement la cible des actions de promotion de produits commerciaux comme les aides au sevrage tabagique dont l'utilité est contestable.
L'opinion est en train de changer lentement, notamment grâce l'action de la dynamique association Formindep qui a réussi à mettre l'État en demeure de publier les décrets d'application de la loi de mars 2002 (dite Kouchner) concernant la transparence de l'information médicale, premier pas vers une souhaitable indépendance.
Bertrand Dautzenberg, médiatique président de l'Office Français de prévention du tabagisme s'expliquait récemment de ses liens d'intérêt avec Pfizer et d'autres laboratoires pharmaceutiques fabriquant des produits censés aider au sevrage tabagique : selon lui, il est tout à fait normal qu'il soit occasionnellement rémunéré pour ses interventions en tant qu'expert du sujet.
Est-ce que c'est normal ? C'est la question posée par le British Medical Journal [1], l'une des revues médicales les plus réputées. Fiona Godlee, sa rédactrice en chef, pose la question dans son éditorial :
« Why is it considered normal for medical leaders to accept personal payment for promoting a company’s drug or device? »
Elle conclut par un cinglant : la médecine a dramatiquement besoin de leaders d'opinion, mais pas de ripous.
« Medicine sorely needs leaders, but not if a they’ve been bought. »
Au fil des ans et des petites habitudes, il est devenu 'normal' pour un médecin avec quelque réputation d'accepter des avantages de la part des industriels. Ceci peut se traduire en honoraires, en avantages en nature (défraiement, congrès luxueux), en cadeaux personnels (camescope), en financement d'études ou de recherche sans compter la contribution au fonctionnement de société savantes ou d'associations diverses comme celles ci-dessus, qui sont de véritables paravents de corruption. Il est même probable qu'aujourd'hui, compte tenu de la difficulté de financement de travaux de recherche, la proximité avec les laboratoires soit une condition sine qua non d'une carrière réussie.
Notes
Le Comité National contre les Maladies Respiratoires est le pionnier de la lutte contre les maladies respiratoires : "Le Souffle c'est la Vie ! " Son action, outre l'aide sociale aux malades respiratoires, s'organise autour de deux axes :
1°) Soutien à la recherche scientifique en pneumologie
- Depuis 1970, plus de 200 travaux de recherche médicale en Pneumologie ont pu être financés par le C.N.M.R, grâce au soutien de ses donateurs, dont l'industrie pharmaceutique, pour un montant de plus de 6 millions d'euros.
2°) Information et prévention
- Programme "Objectif Ecole sans Tabac"
- Prise en charge de centres de sevrage tabagique
- etc.
La Fédération Française de Cardiologie mène chaque année de grandes actions de prévention comme la campagne "Jamais la première cigarette" et en 2007 une campagne annuelle "Coeur sans tabac".
Il est précisé que la FFC (comme le C.N.M.R) ne reçoit aucune subvention de l'État, toutes ses actions sont menées grâce aux seuls dons du public. Gageons que les laboratoires sont de généreux soutiens...
La Fédération Française de Pneumologie
La Société Française de Tabacologie
Référence
- British Medical Journal 2008;336 (21 juin, en libre accès)
Fiona Godlee : Key opinion leaders, your time is up , doi:10.1136/bmj.a413
Ray Moynihan : Key opinion leaders: independent experts or drug representatives in disguise? , BMJ 2008 336: 1402-1403
Giovanni A. Fava : Should the drug industry work with key opinion leaders? No BMJ 2008 336: 1405
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