Le sevrage tabagique avec Champix° majore les risques de suicide, notamment auprès des personnes fragilisées par le tabagisme ou présentant des antécédents de dépression.
Sur le plateau de France 2 le 18 décembre dernier, Bertrand Dautzenberg nous expliquait que le sevrage tabagique créait une dépression et utilisait l'expression "Cigarette blues" par analogie avec le familier "baby blues" en suite d'accouchement. Comme le champix est plus efficace, disait-il, il y a plus de personnes qui s'arrêtent de fumer donc une plus grande probabilité d'humeurs dépressives ! Les alertes de pharmacovigilance ne sont pas - selon ses propos - liées au produit, considéré comme largement inoffensif. Nous avons rapporté ceci dans un précédent billet (1).
Depuis la surveillance a été renforcée. Ce que ne dit pas notre médiatique pneumologue, c'est que l'on n'a jamais rapporté de suicide suite à un arrêt du tabac sans médicament. Une recherche sur la base de publications médicales PubMed révèle 45 890 articles sur le suicide et 16 603 articles concernant l'arrêt du tabac, mais une recherche suicide + arrêt du tabac sans aide médicamenteuse ne révèle aucune étude. Nous n'en avons jamais entendu parler : si les pensées suicidaires sont citées parfois durant un arrêt franc (sans accompagnement médicamenteux), nous ne connaissons pas un seul cas de passage à l'acte. Ceci laisse penser que c'est l'ingestion du produit champix qui majore les risques de suicide, notamment auprès des personnes fragilisées par le tabagisme ou présentant des antécédents de dépression. Champix n’est pas la pilule miraculeuse attendue par ceux rendus sceptiques par leurs échecs répétés : ce n’est pas non plus un produit anodin.
M. Dautzenberg affirme, dans une envolée statistique, que les risques de décès avec champix sont considérablement inférieurs aux risques induits par la continuation du tabagisme, ce que nous voulons bien croire. Mais ce n'est pas une raison pour faire la promotion de ce produit sans réserve comme il s'en abstenait alors (écouter la vidéo). Par ailleurs nous aurions souhaité que Bertrand Dautzenberg signale ses liens d'intérêt avec le fabriquant du médicament : on apprécierait alors mieux les raisons de son enthousiasme...
Une étude publiée en février dans la revue Thorax rapporte la comparaison entre le sevrage tabagique avec palliatif nicotinique (patch) et avec champix (2). Bien que commandée et financée par Pfizer, elle dresse un certain nombre de conclusions dont M. Dautzenberg a dû avoir connaissance. Tout d'abord, il n'est pas constaté de différence statistiquement significative des taux de réussite à trois mois ou à un an entre les deux protocoles : à terme les patchs font à peu près aussi bien (pour ne pas dire aussi mal) que Champix°. Par contre le risque d'effets secondaires avec Champix° est 5,5 fois plus élevé en ce qui concerne les vomissements, la diminution du sens du goût est 5,3 fois plus élevée, les douleurs abdominales cinq fois plus mentionnées, les troubles de l'attention sont multipliés par 4,5, les nausées et flatulences dans un rapport de 4 à un, l'occurence de constipation trois fois plus fréquente, les maux de tête et étourdissements multpliés par 2, et 2,3 fois plus d'utilisateurs de champix se sont plaint de fatigue. Il semble important d'avertir les victimes potentielles de tous ces inconvénients, qui ne sont pas toujours bénins.
Références
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Unairneuf.org, 20 décembre 2007 Quand les champixologues nous rassurent
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Thorax Online; 8 février 2008; Varenicline versus transdermal nicotine patch for smoking cessation: Results from a randomised, open-label trial
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