Gavage et gabegie des pharmacothérapies pour l'arrêt du tabac

À fin novembre 2008, le nombre de remboursements de 50 € pour les produits pharmaceutiques dits d’aide au sevrage tabagique (ou pour la réduction du risque) versés par la CNAMTS atteint 456 098.

Ce chiffre serait en croissance de 17,4 % par rapport à la même période de 2007.

Au total environ un demi million de prescriptions médicales auront fait l’objet d’un remboursement en 2008...

Gabegie

Gabegie parce qu’à l’évidence ce programme, permettant de faire passer la pilule du ban, n’a pas eu d’effet sur la consommation ni a priori sur le nombre de fumeurs en France.

Gabegie parce que ces produits sont inefficaces s’ils ne sont pas accompagnés d’un suivi par un professionnel formé aux arcanes de l’affranchissement d’une dépendance très forte.

Il n’existe d’ailleurs aucune étude d’efficacité de la varénicline sans un tel accompagnement psychologique soutenu. En d’autres termes, il n’est scientifiquement pas prouvé que ce traitement soit efficace à défaut d’une prise en charge similaire au contexte dans lequel ce produit a été autorisé : environ 4 heures de suivi individuel, soit 24 ou 25 consultations chez un médecin généraliste planifiées sur plusieurs trimestres.

Gabegie parce que les ventes de ces produits sont en baisse, ce qui n’est pas cohérent avec l’augmentation du nombre des remboursements.

Stop au gavage

Il apparait que les traitements sont abandonnés avant leur terme indiqué :

• soit parce qu’ils n’apportent pas le confort désiré (effets secondaires),
• soit parce que l'échec de la tentative est reconnu,
• soit parce que les traitements ne sont pas observés dans la durée prescrite : c’est l’argument généralement proféré mais qui ne résout rien.

Au terme d'un mois le fumeur ne peut juger avoir réussi et pourtant passé ce délai la proportion de renouvellement est réduite. C'est ce qu'indique la hausse du nombre de forfaits remboursés couplée avec une baisse des ventes de produits subventionnés comme nous allons le voir ci-après. Il nous semble douteux de prétendre, comme le font nos braves tabacocologues, que l'on accroit les chances de réussite à une tentative en multipliant les occasions d'échec auparavant... Ces tentatives assistées de palliatifs nicotiniques n'apprennent rien au fumeur mais le font douter au contraire de plus en plus de ses chances de réussite : avaler des pilules n'a jamais rien enseigné à personne !

De plus, en ces temps de rigueur financière, les comptes de la Sécurité Sociale sont inutilement allégés de quelques dizaines de millions d’euros, au bénéfice des industries du médicament ou de leurs porte-parole. 

Les chiffres de l’OFDT pour 2008

Un tableau de bord mensuel des indicateurs relatifs au tabac et au tabagisme en France est réalisé par l’OFDT, Observatoire français des drogues et des toxicomanies.

Il est remarquable, dans le tableau ci-après, de constater que toutes les formules pharmaceutiques sont affectées par la perte de confiance de leurs consommateurs.

Ventes de médicaments d'aide à l'arrêt (en mois de traitement)      
Variation par rapport au cumul janv-nov 2007. Source OFDT.

Spécialité pharmaceutique	Mois de traitement	% / Total	2008 /2007
Timbres  transdermiques	467 355	29,4 %	- 44,4 %
Formes orales	730 709	46,0 %	- 5,5 %
Bupropion	21 797	1,4 %	- 60,1%
Varénicline	362 989	22,8 %	- 7,0%
Total	1 588 899	100 %	- 23,1%

  

Notes

1. Le buproprion (anciennement marque Zyban° par GSK), maintenant génériqué, n’est quasiment plus prescrit ; son inventeur a cessé d’en faire la promotion commerciale évidemment
2. Même les ventes de la varénicline, produit le plus récent et supposé le plus efficace, sont déjà en perte de vitesse : il est possible que ce phénomène s’amplifie au vu de ses maigres performances et de risques d’effets secondaires graves
3. Les formes orales, qui permettent selon leurs promoteurs une réduction progressive avant l’arrêt complet, sont moitié moins efficaces pour l’arrêt dans ce contexte ; leur avantage est surtout de permettre de panacher nicotine pharmaceutique et cigarettes. Voir GSK a inventé le traitement perpétuel : une aide pour les fumeurs ne souhaitant pas arrêter