Encore un petit tour au Canada. Au Québec plus précisément, où une étude de longue durée dénommée NICO vise à mettre en évidence les différences entre le tabagisme des jeunes et celui des adultes [1].
Le caractère extraordinaire et sans doute choquant de ce que l'on commence à découvrir et que nous allons rapporter ici ne doit pas être écarté au titre de la désinformation ou de la manipulation. Marc Valleur, qui dirige le célèbre centre de Marmottan à Paris et qui n'est pas en odeur de sainteté dans les couloirs ministériels justement parce qu'il refuse de dire n'importe quoi, confirme : un jeune peut devenir dépendant dès la première cigarette.
Des symptômes de sevrage peuvent apparaître chez les jeunes fumeurs malgré une consommation très faible de tabac [2, 3]. Ces symptômes peuvent être soulagés pendant plusieurs jours par la consommation d'une seule cigarette et peuvent ne survenir que plusieurs jours après la dernière cigarette.
Les principales étapes révélées par l'étude canadienne NICO sur des jeunes d'âge moyen 13 ans sont :
- première inhalation,
- première cigarette complète,
- consommation mensuelle, hebdomadaire puis quotidienne
- consommation cumulée de 100 cigarettes et plus
Les symptômes de manque apparaissent bien avant la consommation hebdomadaire et quotidienne ou la consommation de 100 cigarettes. La première bouffée risque de se traduire par un processus conduisant à l'apparition de symptômes de dépendance et à l'usage croissant de cigarettes.
Les travaux de Joeph DiFranza de l'Université du Massachusetts ont remis en question le modèle en cinq étapes du Surgeon General publié dans le rapport 1994 :
- préparation, éveil à l'intérêt du tabac,
- essai,
- usage irrégulier,
- usage régulier puis deux ou trois ans après,
- dépendance à la nicotine.
Il est possible que les interventions d'aide à l'arrêt soient rapidement nécessaires après la première bouffée chez certains jeunes... et probablement avec des procédés différents de ceux pour les adultes. L'usage des palliatifs nicotiniques n'a pas fait la preuve de son utilité - même si certains sont autorisés à partir de 15 ans.
Voici les étapes de l'entrée dans le tabagisme de jeunes de 13 ans résumées dans un tableau :
Niveau de consommation |
Temps écoulé depuis l’initiation tabagique |
Symptôme de dépendance |
Inhalation |
1,5 mois |
|
Cigarette entière |
2,5 mois |
Dépendance psychologique |
|
4,5 mois |
Fortes envies de fumer |
|
5,4 mois |
Dépendance physique |
Tabagisme mensuel |
8,8 mois |
|
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11,0 mois |
Symptômes de sevrage |
|
13,0 mois |
Tolérance |
Tabagisme hebdomadaire |
19,4 mois |
|
100 cigarettes consommées |
19,5 mois |
|
Tabagisme quotidien |
23,1 mois |
|
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40,6 mois |
Dépendance clinique au tabac, selon l’OMS |
Après 54 mois, environ 30 % des jeunes qui ont expérimenté une (1) cigarette finiront par être « accros ». Les garçons qui développent une dépendance au tabac seront des fumeurs pendant 16 ans, alors que chez les filles, la durée moyenne passe à 20 ans.
Références
- Étude NICO pour mieux comprendre, Montréal (Québec)
- O’Loughlin J, Kishchuk N. , Repenser et recadrer la recherche sur le tabagisme chez les jeunes ; Drogues, santé et société, vol. 6 n°1, juin 2007 (pdf).
Info-tabac (Canada) :Tabagisme juvénile - La dépendance au tabac s’acquiert plus tôt qu’on le croit
4 jeunes fumeurs sur 5 ont déjà ressenti un besoin incontrôlable de fumer. Ils recourent à la cigarette lorsqu’ils sont agités, irritables ou déconcentrés.
Les fumeurs se sentent plus à l’aise parmi d’autres fumeurs quand ils ont eux-mêmes une cigarette en main. Si un(e) jeune commence à fumer, un entourage composé de fumeurs l’encouragera à fumer de plus en plus. D’autre part, fumer n’est pas vraiment considéré comme un atout social. Un peu moins du tiers des jeunes pensent encore que demander une cigarette est la façon idéale de commencer une conversation
Rédigé par : conseils dependance | 25/04/2011 à 17:18