DG est une jeune maman, fumeuse de cigarettes depuis plus de 30 ans et ayant aussi tâté de produits interdits. Son conflit avec un médecin tabacocologue étant exemplaire, elle a accepté de nous conter son histoire. Puisse ce témoignage bien ordinaire être utile au plus grand nombre.
Je suis allée au service de pneumologie de l’hôpital européen Georges Pompidou lundi 9 février 2009. J’avais pris rendez-vous quelques jours auparavant pour une aide à l’arrêt du tabac.
J’ai commencé à fumer à 11 ans et malgré la peur au corps que j’avais depuis que j’avais vu mourir mon père d’un cancer de la mâchoire, je n’arrivais pas à couper avec la cigarette. On m’avait vanté les performances en tabacologie de cet hôpital. La personne du secrétariat avait été charmante au téléphone et c’est donc très confiante que j’ai pris le bus ce jour-là.
Une fois là-bas, j’ai patienté longtemps dans une salle d’attente vide. Le médecin est arrivé en retard, visiblement agacé par le fait qu’on avait oublié de me donner un long formulaire à remplir. Je me suis dépêchée mais cela m’a quand même pris un bon quart d’heure. Il y a jeté un coup d’œil très rapide, comme une formalité, et m’a annoncé que j’allais prendre du Champix.
J’ai un ami qui a pris ce traitement et avec qui cela s’est mal passé : idées noires, dépression... J’ai donc fait part de mes réserves au médecin. Sa réponse a été sans appel :
« Nous ne pouvons pas être deux médecins ici ! Le médecin, c’est moi. »
Une longue bataille s’est alors engagée. Comme je lui disais que je préférais envisager d’autres méthodes, il soutenait qu’elles ne seraient pas efficaces. Quand je lui ai expliqué plus vivement mes inquiétudes par rapport au Champix, il m’a dit que je prendrai du Champix avec en plus des petites doses d’anxiolytiques parce que ça se voyait que j’étais une grande angoissée et que par ailleurs, comme il n’était pas exclu que je tombe dans une dépression en cours de traitement, il m’enverrait voir un psy.
Quand je l’ai interrogé sur son insistance à vouloir absolument prescrire ce produit, il m’a coupé en me disant que « les gens de ce laboratoire [n’étaient] pas ses cousins », qu’il ne tirait aucun profit personnel de ce médicament mais qu’il avait constaté qu’il obtenait 80 % de réussite (sic).
Ce débat s’est prolongé pendant plus d’une heure et demie. J’étais étonnée qu’un médecin puisse mettre tant d’énergie et de temps à essayer de convaincre un patient de prendre un médicament contre sa volonté. Il m’a donné rendez-vous le lundi suivant pour commencer le traitement.
Je suis partie abasourdie, en me disant qu’il avait sans doute raison, que j’étais une loque parce que j’aurais infiniment de mal à m’arrêter de fumer et que j’étais une dépressive qui s’ignore. Les jours qui ont suivi ont été moroses, je me rappelle que je ressassais continuellement de notre conversation, en sourdine. Je me sentais triste.
Jeudi soir, je consultais des sites internet sur le Champix et suis tombée tout à fait par hasard sur un article d’UnAirNeuf.org. On y parlait de l’arrêt franc, d’apprendre à faire face aux envies de fumer, du leurre des substituts nicotiniques (effectivement j’avais essayé plusieurs fois avec des patchs et autres substituts et j’avais toujours fini par rechuter), du fonctionnement du cerveau par rapport à la nicotine. Cela m’a vraiment parlé et ai décidé d’arrêter de fumer sur le champ.
Le lendemain, je me suis sentie heureuse, j’ai annulé mon rendez-vous à l’hôpital. Tout s’est bien passé, je n’ai pris ni médicaments ni poids de façon significative ; et je n’ai pas déprimé...
Cela fait maintenant trois mois que j’ai arrêté de fumer. Pendant cette période, j’ai été confrontée à des situations difficiles :
- disputes et jugement suite à ma séparation d’avec le père de mon fils,
- pression dans le travail,
- grandes javas où l’alcool coule et où tous les amis fument, etc.
Pourtant je n’ai pas eu trop de mal à ne pas fumer. À vrai dire, cela m’arrive encore d’y penser mais de façon toute à fait passagère. Je suis même fière d’avoir appris à surmonter cette envie, et je le prends comme quelque chose de naturel, comme quand une cicatrice nous élance à chaque variation du baromètre.
DG, 43 ans
[Mise à jour 19.01.2015]
Contactée ce jour, DG n'a toujours pas remis une cigarette à sa bouche :-)