Campagne anti-tabac de DNF : réaction de l’agence Ligaris

DNF retire sa campagne de propagande controversée [1]. Voici la réaction de l'agence Ligaris [2], dont nous avons félicité ici la qualité des productions [3, 4].

Nous avons la chance de gérer le budget de communication pour la prévention du tabagisme pour la DG Sanco de la Commission Européenne (Direction générale de la santé et des consommateurs), ce dans 27 pays et en 23 langues, depuis cinq ans : c’est dire que nous avons décortiqué à la loupe de nombreux pré- et post-tests et analyses des campagnes nationales.

Les leviers de communication utilisés pour toucher les jeunes européens sont de quatre ordres :

1. l’émotion
2. l’autonomisation, la responsabilisation, la pédagogie
3. l’estime de soi, le jugement des pairs
4. la recherche de connivence selon plusieurs modalités (absurde, humour, transgression, etc.)

Avec la campagne « Help - Pour une vie sans tabac », l’Union Européenne a pris le parti d’utiliser l’humour, dont 88 % des jeunes européens apprécient l’utilisation car c’est l’occasion de parler du tabagisme d’une nouvelle manière (74 %), et c’est une incitation à aller chercher de l’aide (82 %).

Nous constatons, auprès des jeunes européens,

• un fort rejet des communications autoritaires et « descendantes »,
• une attente de proximité et de connivence,
• une aisance à détecter les ruses des annonceurs,
• un goût pour la provocation et la transgression.

Alors, la campagne de DNF serait dans ce registre transgressif très en phase avec ces attentes ? Plusieurs remarques immédiates :

1. Il n’y a aucune cohérence entre les annonces presse et le film réalisé par Yvan Attal, qui est au demeurant très bien fait et qui utilise un tout autre argument que la provocation sexuelle : celui de la composition même du tabac. Le communiqué de presse de l’association et de l’agence ne parle pratiquement que de la presse : c’est plus pratique en terme de provocation.


2. L’explication donnée par l’association autour de l’argument « quand on fume, on se soumet » peut être pris en considération, mais l’utilisation de la métaphore de la soumission sexuelle est hors de propos et donne de l’eau au moulin des détracteurs de la publicité qui dénoncent régulièrement les dites transgressions.

Enfin, quel est l’objectif de cette campagne ?

• Est-elle destinée à informer les jeunes des dangers du tabac
  (comme le fait très bien le film),
• est-elle destinée à faire connaître cette association qui défend les droits du non fumeur (dites-moi le rapport avec la campagne ?), ou
• est-elle destinée à valoriser l’agence ?

Ces annonces Presse sont de trop dans un monde où la violence s’affirme tous les jours. Ce n’est pas aux publicitaires d’en rajouter et de provoquer des polémiques qui ne servent ni la cause de l’anti-tabac, ni la cause des publicitaires.
 
Pierre Siquier, Président de l’agence Ligaris

Références

1. DNF, Droits des Non-Fumeurs, association reconnue d'Utilité Publique (et pas très franche sur ce coup de buzz)
2. LIGARIS, 41, rue Greneta 75002 PARIS Tel. : 01 53 00 10 00
3. Campagne Helpers : le respect des fumeurs progresse
4. Une campagne de marketing viral pour dénormaliser le tabagisme ...

---

Crédit

Article publié dans InformationHospitaliere.com, le magazine de l'information médicale professionnelle et de la santé en continu a destination des professionnels de santé : Campagne anti-tabac de DNF : réaction de Pierre Siquier

Crédit illustration

Montage de : Alice au pays d'Aimer Veille, 15 mai 2009, Aux censeurs de tous poils (merci pour l'autorisation et bravo pour ton inspiration).