Tabagisme : l'esprit prime sur le corps
La nouvelle étude surprenante de l'Université de Tel Aviv montre que les envies de fumer résultent de l'habitude, et non d'une dépendance physique.Dans une étude publiée dans le Journal of Abnormal Psychology [1], Dr Reuven Dar du département de psychologie de l'Université de Tel Aviv a constaté que l'intensité des envies de fumer a plus à voir avec la dépendance psychologique qu'avec les effets supposés addictifs de la nicotine.
« Ces résultats pourraient ne pas être populaire auprès des partisans de la théorie dépendance à la nicotine, car ils sapent le rôle physiologique de la nicotine et soulignent que l'esprit prime sur le corps quand il s'agit de tabagisme », dit le Dr Dar. Il espère que cette recherche aidera les cliniciens et les autorités sanitaires à développer des programmes d'aide au sevrage tabagique plus efficaces et que les onéreux patchs ou chewing-gums à la nicotine.
La théorie s'envole
Dr Dar et ses collègues ont constaté que la durée du vol n'a aucun impact significatif sur les niveaux de manque, qui ont été similaires pour les vols courts et longs. En outre, les niveaux d'envie à la fin de chaque vol de courte durée étaient beaucoup plus élevés que ceux de la fin du long vol, ce qui démontre que les envies de fumer augmentent par anticipation de l'atterrissage, quelle que soit la durée totale du vol. Il en conclut que l'envie est produite par des signaux psychologiques plutôt que par les effets physiques de la privation de nicotine.
Interdit de fumer le jour du sabbat
Dans une précédente étude datant de 2005, le Dr Dar a examiné des israéliens de religion juive fumeurs s'interdisant de fumer le jour du sabbat. Il les a questionnés sur leurs envies de fumer lors de trois circonstances différentes : le jour du sabbat, un jour de semaine ordinaire, et un jour de semaine où ils devaient s'abstenir de fumer. Les participants ont été interrogés à la fin de chaque jour sur leurs niveaux d'envie.
Ce que le Dr Dar constaté était que envies étaient très faibles dans la matinée du jour du sabbat, lorsque le fumeur savait qu'il ne serait pas en mesure de fumer pendant au moins 10 heures. Les niveaux d'envie augmentaient progressivement à la fin du sabbat, lorsque les participants anticipaient leur première cigarette de reprise. Les niveaux d'envie en semaine sans restriction étaient aussi élevés que le jour où ils se sont abstenu, montrant que le besoin n'est pas lié à la privation de nicotine.
[La nicotine n'est pas une substance addictive]
Les études du Dr Dar permettent de conclure que la nicotine n'est pas addictive au sens où la dépendance physiologique est généralement définie. Bien que la nicotine ait un rôle physiologique dans l'augmentation des capacités cognitives comme l'attention et la mémoire, ce n'est pas une substance addictive comme l'héroïne, qui crée de véritables symptômes de sevrage physiques et systémiques, dit-il.
Dr Dar estime que les gens qui fument le font pour les bénéfices à court terme, comme la gratification orale, le plaisir sensoriel ou de camaraderie sociale. Une fois l'habitude établie, les gens continuent à fumer en réponse à des signaux et à des situations qui deviennent associées au tabagisme. Dr Dar estime que considérer le tabagisme comme une habitude, et non pas comme une dépendance, facilitera sa prise en charge. Il suggère que les remèdes au tabagisme mettent l'accent sur les aspects psychologiques et comportementaux de l'habitude sans focaliser sur les aspects biologiques comme cela est le cas actuellement [2].
Article traduit de :
Smoking Mind Over Smoking Matter
American Friends of Tel Aviv University, 13.07.2010
(avec l'aimable autorisation de Reuven Dar, original anglais ici)
Références
- The craving to smoke in flight attendants: Relations with smoking deprivation, anticipation of smoking, and actual smoking.
Dar, Reuven; Rosen-Korakin, Nurit; Shapira, Oren; Gottlieb, Yair; Frenk, Hanan; Journal of Abnormal Psychology, Vol 119(1), Feb 2010, 248-253. - cf. l'ouvrage de Hanan Frenk et Reuven Dar : Dépendance à la nicotine. Critique d'une théorie ; Préface de Robert Molimard ; Paris, Les Belles Lettres, 2004.
Bonjour,
Super cet article. Oui effectivement, il est question de plus en plus de cette relation de dépendance par rapport aux habitudes.
Et savez-vous que la plupart des fumeurs n'arrêtent pas de fumer à cause de fausses excuses.
Prendre conscience de ces fausses excuses, permet vraiment de franchir un pas décisif dans l'arrêt du tabac.
Pour ceux qui sont intéressés par le sujet, vous pouvez visionner 3 vidéos gratuites qui expliquent très bien tout ça à partir de mon blog http://www.arret-de-tabac.blogspot.com
On trouve aussi d'autres infos intéressantes dans ces vidéos comme par exemple les raisons exactes qui vous poussent à fumer (et qui ne sont pas toujours celles que l'on croit...) et comment vous en débarrasser pour de bon, etc etc.
Bonne journée à tous.
Stéphane
Rédigé par : Stéphane | 26/07/2010 à 10:48
Vous avez oublié de préciser le conflit d'intérêt des auteurs avec l'industrie du tabac!
Cela permet une lecture critique.
Rédigé par : Jacques | 25/01/2011 à 11:24
Le fait de fumer est pour la plupart des fumeurs assimilé à un plaisir. Pour renoncer à ce plaisir, qui créé la dépendance psychique, il est fortement recommandé de compenser par un plaisir équivalent.
La dépendance psychique est particulièrement difficile à vaincre puisqu’elle sous-entend d’être bien dans sa tête, en harmonie avec soi-même et avec les autres. Or, généralement, la compensation du plaisir de la cigarette aboutit souvent à des grignotages et par ricochet à une prise de poids. De quoi démoraliser encore plus et céder à l’appel de la cigarette. La meilleure arme contre la dépendance psychique au tabac est d’être accompagné et remotivé par ses proches en cas de baisse de moral.
Rédigé par : conseils dependance | 23/04/2011 à 11:37