Pour ceux qui connaissent un peu le fonctionnement de l'esprit, il est évident que les techniques millénaires développées en Asie peuvent être un recours dans l'affranchissement de la dépendance au tabagisme, et sans médicament.
La thérapie cognitive basée sur la pleine conscience est une technique utilisée en milieu hospitalier, pour soigner les troubles psychiatriques. Elle a été mentionnée lors d'une conférence sur les aides à l'arrêt du tabac [1].
Cet article un peu technique concerne le geste mental du sankalpa, pratique traditionnelle du yoga nidra. Pour son apprentissage pratique, il conviendra, comme cela est la règle dans ces techniques spirituelles, de faire appel à un instructeur. Nous avons pensé cependant intéressant d'en présenter une introduction.
Le sankalpa est une résolution positive
Le sankalpa signifie « résolution » en sanscrit [2]. C'est une étape fondamentale dans le yoga nidra, la détente allongée profonde. Le sankalpa est une résolution positive que l'on se donne à soi-même et qui est répétée. Il diffère de nos bonnes résolutions habituelles et ne correspond pas non plus à la technique de la pensée positive (méthode Coué) car il est implanté dans le mental profond en situation de détente, en l'absence de toute perturbation et sans le ressort de l'urgence.
L'être humain fonctionne principalement avec le pouvoir des désirs qui agissent comme une locomotive. Nous en connaissons une multitude. La pratique du sankalpa est l'occasion de s'interroger sur ce que nous voulons vraiment et de mettre le mental en phase avec ce besoin le plus profond de notre être, ce « désir racine ». Le sankalpa est la formulation d'une motivation profonde qui transcende la réalité de tous les autres désirs.
Sankalpa et volonté
Le sankalpa travaille sur la capacité de volonté et la clarté de pensée. La plupart du temps, nous sommes incapables de nous extraire de tel ou tel comportement, de l'emprise d'une situation ou de mettre en oeuvre une discipline allant dans le sens de nos résolutions et de nos besoins profonds. Le sankalpa se destine à développer le désir profond, différent d'une surimposition intellectuelle susceptible de nous lâcher à un moment ou un autre. Souvent, on sait très bien ce que l'on devrait faire et les changements que l'on devrait apporter aux comportements mais cette connaissance reste lettre morte et n'a aucun effet. En devenant une force directrice de sa vie, le sankalpa va remplir ce fossé entre ce que l'on aimerait devenir et ce que l'on vit en réalité.
Le sankalpa s'exprime à travers des mots ou par une pensée, mais c'est plus que cela, c'est un pouvoir, une force : « C'est une graine que vous semez dans le lit de votre mental » (Swami Satyananda).
Tout ce que nous pensons possède une force qui se projette dans notre être et dans l'environnement. Ce que nous exprimons, négativité et positivité, optimisme et pessimisme, joie et tristesse laisse une impression dans le mental. Si le sankalpa est répété avec intensité et conviction, l'impression laissée sur le mental sera plus marquée et l'on pourra retrouver facilement cette trace ou ce canal. Le sankalpa correspond donc au fait de semer une graine ou de construire un canal qui guidera ensuite le mental. Le sankalpa peut être le créateur de notre destinée mais aussi nous aider à nous affranchir de nos dépendances.
Déterminer et mettre en oeuvre le sankalpa
La difficulté à trouver son sankalpa est réelle [3]. Le yoga en général et le yoga nidra aident à cette détermination du sankalpa car ils nous rapprochent de nous-même. La formulation va s'affiner au fur et à mesure que l'on cerne mieux ce que l'on veut exprimer. Le sankalpa n'est pas de l'ordre du désir que l'on veut voir exaucé. Le facteur temps compte. Un sankalpa ne devient pas tangible et manifesté en deux jours. Cela prend du temps. On ne peut changer sa vie en une nuit et notre confusion mentale est telle que le sankalpa peut prendre des années voire toute la vie à se réaliser. Plus on le répète souvent, avec ardeur et conviction, plus il agit.
La formulation est essentielle. Il faut exprimer clairement son aspiration et sa motivation, avec des mots reflètant la force positive qui va servir de guide et de moteur. La phrase doit être courte et concise, directe et simple. Cela permet au mental subconscient d'enregistrer plus facilement le sankalpa et de l'évoquer spontanément. En voici un exemple utilisable avec un souhait intime de cesser la dépendance au tabagisme :
« En me passant de fumer, je vais très vite être fière de moi et retrouver une sensation de liberté. »
Il vaut mieux éviter les énumérations, éliminer toute ambiguïté et aller à l'essentiel de l'inspiration. Il faut aussi éviter d'être vague ou trop général : préférer l'expression de sensations que l'on pourra éprouver avec le temps. On doit bannir les formules négatives ou comparatives « je ne veux plus faire ou être telle et telle chose », « j'arrête de me mettre en colère » ou « je ne fume plus ». Au niveau du subconscient, l'aspect négatif de la phrase écrase le sens des mots eux-mêmes. Il est donc nécessaire de trouver une façon positive de formuler la même résolution ou bien trouver et exprimer le ressort positif qui va apporter le résultat voulu.
Quand le conscient et l'inconscient sont en conflit, c'est toujours l'inconscient qui gagne. Ainsi nous avons constaté que pour certaines personnes, exprimer une sensation positive de soi non fumeur était impossible : notre expérience laisse penser qu'alors les essais (par la volonté) seront vains... Les illusions induites par la dépendance rendent l'exercice de formuler un sankalpa efficace dans l'arrêt du tabac particulièrement délicat : il est recommandé de faire valider sa formule par une personne compétente (renseignements sur demande).
Le sankalpa devient un ordre conscient donné au subconscient
La détente profonde (induite par la technique du yoga nidra) rend le subconscient réceptif et accessible. Si la formule choisie lui convient, notre subconscient enregistre la suggestion et apportera la ressource nous aidant à aller dans le sens que nous avons choisi chaque fois que ce sera pertinent. On utilise donc la puissance du subconscient de façon positive. Trop souvent nous nourrissons des pensées négatives ou de peur, notamment quand nous essayons de changer envers et contre nous-même. L'efficacité réside en cela : le subconscient enregistre une suggestion et ensuite c'est lui qui va spontanément nourrir le mental conscient, pour atteindre le but que l'on s'est fixé.
La réalisation du sankalpa est certaine, même si nous ne savons ni quand ni comment il se réalisera. La foi que l'on met dans le sankalpa et l'absence de doute quant à sa réalisation place la pratique bien au-delà de l'intellect. Le sankalpa s'appuie sur les forces vives des sentiments et des sensations.
Pratiquer régulièrement le sankalpa
Dans la technique du yoga nidra, on répète deux fois le sankalpa, une fois au début de la séance et une autre fois avant de quitter la pratique. La première répétition équivaut à planter une graine et la deuxième irrigue cette graine avec tout ce que le yoga nidra a fait émerger en nous, détente et réceptivité, créativité, intuition et inspiration. La relaxation étant ce qui permet d'aller plus profondément en soi, le sankalpa repris en fin de pratique est donc beaucoup plus puissant. Corps et mental sont déconnectés. Si le yoga nidra a été bien suivi, on est en contact direct avec le subconscient.
En dehors de la pratique du yoga nidra, le sankalpa peut être utilisé chaque jour, dans des moments calmes, notamment au réveil et au coucher qui sont considérés comme des moments propices et également pendant sa pratique de yoga ou une autre activité spirituelle. Pour l'arrêt du tabac, quelques conditions particulières rendent le sankalpa efficace : la pratique finit par gommer les envies de fumer, littéralement, et même quand on fume en rêve !
Références
- La tabacologie sous influence de la pharmacie : un congrès tronqué
- Le sankalpa
- Déterminer et mettre en oeuvre le sankalpa
À lire sur le même sujet