Un tabacologue australien faisait remarquer, dans une publication récente [1], qu'il lui avait été impossible d'identifier une seule publication sur l'efficacité réelle 'dans la vraie vie' de la varénicline (marque Champix de Pfizer) pour l'arrêt durable de la cigarette.
Le gouvernement australien finance pourtant à hauteur de 5 millions de dollars par mois le remboursement des prescriptions de Champix par les professionnels de santé.
La varénicline étant autorisée à la vente depuis mi 2006 sur la base d'études cliniques toutes financées par le fabricant, il serait peut-être souhaitable que l'AFSSAPS dispose d'études d'efficacité indépendantes en vue de la révision de l’évaluation du rapport Bénéfice/Risque qu'elle doit effectuer pour cette spécialité particulièrement surveillée.
On peut affirmer sans se tromper que si les risques sont connus, en témoigne le renforcement des avertissements concernant les effets secondaires largement relayé par les medias, les bénéfices restent un mystère bien gardé. Le rapport Bénéfice/Risque ne peut être alors qu'une élucubration sans fondement scientifique.
Car quand les tests cliniques avaient repéré plus de 160 effets secondaires (!) sur des publics sains, la pharmacovigilance a montré que des risques graves pouvaient survenir dans la vraie vie [2]. Les données des tests d'homologation - menés "selon la procédure d'urgence" comme si le tabagisme menaçait l'humanité - sont complétées par les signalements depuis cinq ans. Mais si l'on prend en compte les signalements du terrain et non sur des publics ad hoc, il convient aussi d'apprécier l'efficacité éventuelle du traitement comme aide à l'arrêt 'dans les conditions réelles d'utilisation' : simple question de cohérence.
Ainsi dans deux des tests cliniques initiaux, 29,5 % et 29,9 % des effets indésirables signalés étaient d'ordre psychiatriques, alors que ce taux s'élève à 72 % dans la vraie vie. Nous ne voulons pas suspecter Pfizer d'avoir caché des cas impactant négativement son dossier d'autorisation : il se peut que ce ne soit lié qu'aux conditions de la mesure, les unes dans un contexte contrôlé avec un public sélectionné (à plus de 50 %) [3], l'autre sur la base des remontées de terrain par la pharmacovigilance.
De la même façon,
- les tests cliniques éliminent les personnes n'ayant pas respecté les 12 semaines du traitement alors que,
- dans la vraie vie 44 à 55 % des bénéficiaires de l'Assurance Maladie australienne (Pharmaceutical Benefits Schedule (PBS)) arrêtent la médication avant la fin du premier mois.
Les données Pfizer et les résultats de terrain ne sont pas directement comparables.
Si l'on veut être honnête, il convient de déterminer le rapport :
Bénéfice à un an de Champix dans la vraie vie
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Risques d'effets indésirables dans la vraie vie
En attendant que l'agence du médicament dispose de chiffres incontestables, serait t'il éthique de suspendre la prescription par les professionnels de santé d'un produit à l'efficacité si mystérieuse ?
Références
- Australia's experience with varenicline: usage, costs and adverse reactions ;
Walsh, R. A. (2011), Addiction, 106: 451–452. doi: 10.1111/j.1360-0443.2010.03282.x - CHAMPIX® : Suicides et troubles psychiatriques, en France aussi
SantéLog, 10.01.2011 - Varenicline (alias Champix°) : des tests bien partiels
À lire sur le même sujet
- Chantix / Champix Worth Questioned ; whyquit.com, 06.01.2011, source : Wall Street Journal, Behind Antismoking Policy, Influence of Drug Industry
- Champix : une analyse des risques
- Evaluation of varenicline as an aid to smoking cessation in UK general practice - a THIN database study ; Blak BT, Wilson K, Metcalfe M, Maguire A, Hards M. ; Curr Med Res Opin. 2010 Apr;26(4):861-70.
Cette enquête a le mérite d'exister, mais ne rapportant les résultats que d'un utilisateur sur quatre, il serait excessif d'en tirer une conclusion solide... En intention de traiter, le taux de succès à 6 mois est de 7 fumeurs abstinents pour cent inclus au départ.
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