L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a choisi "La Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac" (CCLAT) comme thème de la prochaine Journée mondiale sans tabac, mardi 31 mai 2011 prochain. Premier traité à avoir été élaboré sous les auspices de l’OMS, la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac impose des obligations aux pays (et à l’Union européenne) qui y ont adhéré (ses "Parties") de :
- mettre les politiques de santé publique à l’abri des intérêts commerciaux et autres de l’industrie du tabac ;
- proposer des moyens de s’affranchir de la dépendance à l’égard du tabac ;
- interdire la vente de tabac aux mineurs et par les mineurs ; etc.
"Lors de la Journée mondiale sans tabac 2011 et durant toute l’année qui suivra, l’OMS fera tout son possible pour inciter les pays à mettre le traité au cœur de leurs dispositifs de lutte contre l’épidémie mondiale de tabagisme."
Adhérer à la CCLAT, revient pour un pays à abandonner la liberté de fixer sa politique concernant les usages du tabac : c'est un traité contraignant, paravent derrière lequel se cachent nos responsables politiques pour appliquer des consignes venues d'ailleurs. Ailleurs ?
L'influence des industries pharmaceutiques sur l'OMS : la santé est avant tout une source de business
Nous pouvons remarquer que dans la présentation de l'OMS, l'obligation de "mettre les politiques de santé publique à l’abri des intérêts commerciaux et autres de l’industrie du tabac" vient en première position. Ce qu'omet de préciser l'OMS, c'est que si elle exige de rompre les liens d'intérêt avec l'industrie du tabac, c'est pour mieux se mettre sous la coupe des industriels du médicament. L'épisode de la gestion de la grippe A H1N1 aura montré l'opacité des modes de fonctionnement de l’OMS et sa résistance à reconnaître ses liens avec les laboratoires. L'Organisation Mondiale est majoritairement financée par des fonds privés, donc non gouvernementaux, comme le sont en France les agences sanitaires compétentes sur le médicament, avec les résultats que l'on sait.
"On voit bien qu’actuellement les pouvoirs publics font passer la santé des firmes avant celle des patients. C’est un choix."
(Bruno Toussaint, revue Prescrire, déposition à la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) sur la prescription, la consommation et la fiscalité des médicaments, le 31 janvier 2008)
En acceptant l'argent des industriels pharmaceutiques l'OMS est de connivence avec leurs intérêts : sous couvert de santé, il s'agit avant tout d'ouvrir large les vannes des débouchés des produits d'une industrie 'partenaire' [1].
Ceci transparaît dans l'obligation de proposer "des moyens de s’affranchir de la dépendance à l’égard du tabac" : il s'agit de produits plutôt que de services, et de produits homologués et régulés par les agences du médicament. Les services non médicalisés, on en parle à l'occasion, mais on n'en fait pas la promotion (et surtout pas en France, premier consommateur européen de médicaments).
L'OMS vise à éradiquer la consommation de tabac : développer des pratiques à risque réduit comme le tabac oral (Snus) est écarté : cela serait tendre une perche aux diaboliques distributeurs de tabac et sans intérêt pour la promotion de médicaments. On peut vendre de la nicotine, à condition que ce soit via le seul réseau pharmaceutique...
Cette polarisation en faveur de Big Pharma se révèle dans toute sa splendeur dans le combat acharné de l'OMS contre la cigarette électronique. Alternative cent fois moins risquée que fumer du tabac, cette option est systématiquement dénigrée. Parce que voir de la fumée sortir de la bouche d'un vapoteur donnerait envie de fumer à notre jeunesse ? Cela n'est pas démontré, mais la raison importe peu ici : il faut défendre les intérêts des bailleurs de fonds. La santé, on s'en fout : il vaut mieux que les fumeurs accros fument plutôt qu'ils vapotent sur ces dispositifs non pharmaceutiques et sans danger connu...
“Electronic cigarettes should be regulated as nicotine delivery devices, and where this regulation is not possible under tobacco control laws, should be subject to regulation of contents and labelling, prohibitions against use in public places, and restrictions on advertising, promotion, and sponsorship” [2].
En clair : s'il est possible d'interdire la vente de ces dispositifs, il convient de le faire et si ce n'est pas possible... les prohiber quand même.
L'OMS est devenu un organe régulateur au-dessus de nos lois communes. C'est dangereux pour notre démocratie : sous l’étendard de la santé pour tous, la dictature sanitaire avance masquée.
Invitation gratuite
Si vous tenez à vérifier nos dire et célébrer cette Journée mondiale sans tabac, participez au colloque
Tabagisme : du contrôle à la prise en charge
organisé par le Réseau des établissements de santé pour la prévention des addictions en collaboration avec la Direction générale de la santé.
Parmi les points abordés par nos hérauts au caducée, notons :
- L'état de l'application de la Convention-cadre de l’OMS de lutte anti-tabac en France et perspectives ;
- Les interventions 'systématiques' (sic) à l'hôpital : accompagnement et sevrage contraint en milieu psychiatrique ;
- Le tabac au cœur des addictions, etc.
Programme détaillé ici (inscription obligatoire).
Références
- En témoigne ce communiqué OMS/99/04 du 30 janvier 1999 : L'OMS instaure un partenariat avec l'industrie pharmaceutique pour aider les fumeurs a renoncer au tabac ; "Ce projet de partenariat réunit trois grandes sociétés pharmaceutiques, Glaxo Wellcome, Novartis et Pharmacia & Upjohn [aujourd'hui Pfizer], qui fabriquent toutes trois des produits pour le traitement de la dépendance à l'égard du tabac."
- Report by the Convention Secretariat - Control and prevention of smokeless tobacco products and electronic cigarettes ; WHO Framework Convention, 15 September 2010 (p. 5, pdf)
