On vit très bien sans fumer. Pour certaines personnes, la consommation de tabac est cependant devenue une habitude profondément ancrée dans les différents moments de la vie : ses effets (et son absence) doivent être pris en charge lors de la transition vers l'arrêt.
1 - Effets généraux du tabagisme
La cigarette apporte un soutien aux sujets qui ont du mal s'affirmer dans les relations avec les autres, qui ont une piètre image d’eux-mêmes ou qui manquent de confiance en eux : il n'est pas rare que les premières cigarettes aient été fumées dans de telles circonstances…
Les cigarettes peuvent apporter une aide dans les états de déprime, de mal-être. Le tabagisme fonctionne alors comme un régulateur de l’humeur. Il a également une action de stimulation générale, en particulier pour « démarrer » le matin.
Un autre bénéfice est l’aide apportée par la cigarette dans les situations difficiles à affronter ; elle constitue une aide efficace pour gérer son stress. Si quelqu'un a tendance à réagir de façon exagérée à tous les évènements de la vie quotidienne, la cigarette est alors un amortisseur efficace.
Un aspect également recherché est celui de la stimulation intellectuelle : la nicotine favorise la concentration, la vigilance, l’attention et la mémoire immédiate ; fumer peut ainsi aider dans certaines activités intellectuelles, par exemple chez les écrivains ou les informaticiens.
Passées les premières expérimentations dont on garde un souvenir désagréable, fumer une cigarette génère un plaisir particulier qui n'est pas le plaisir intense, l’euphorie ou éventuellement « l'extase » de certaines drogues. C’est une sensation de soulagement tranquille, accompagné de détente partagée lorsque la cigarette est fumée en groupe. La pause cigarette est alors un élément de convivialité apprécié.
Enfin principalement chez des femmes qui craignent le surpoids, la cigarette contribue à réguler l’alimentation : elle augmente le nombre de calories brulées et constitue un coupe-faim efficace. À trois mois de l’arrêt, la prise de poids est en moyenne de deux à trois kilogrammes ; parfois plus, et c’est souvent une raison invoquée pour recommencer de fumer !
2 - Fonctions cérébrales
La nicotine est un alcaloïde présent dans la feuille de tabac à hauteur de 10 à 20 mg par gramme de tabac séché : il lui est attribué un rôle central dans l'établissement de la dépendance au tabagisme. La molécule de nicotine a la forme de l'acétylcholine, un neurotransmetteur jouant un rôle physiologique très important. Des récepteurs spécifiques pour l'acétylcholine existent dans les muscles, les vaisseaux, le cœur et surtout le cerveau.
L'acétylcholine cérébrale joue un rôle essentiel dans toutes les cognitions. Après l'inhalation, la nicotine est absorbée très rapidement par voie pulmonaire et le sang artériel l'apporte en quelques secondes dans le cerveau. Elle prend alors la place de l'acétylcholine sur les récepteurs de l'acétylcholine ; elle se comporte comme un neurotransmetteur artificiel, une fausse clef selon la comparaison classique.
La nicotine agit sur le circuit cérébral de la récompense en stimulant les neurones dits dopaminergiques et secondairement d’autres secrétions de monoamines. Cette stimulation dopaminergique répétée a pour conséquence un découplage de la régulation cérébrale avec survenue du besoin irrépressible de consommation. En se fixant sur le cortex préfrontal, elle participe au contrôle des comportements.
3 – Dopage sportif
Toutes ces propriétés de la nicotine expliquent que le tabac (ou la nicotine pharmaceutique) consommés sous forme orale aient pu être utilisés comme dopant dans certains sports nécessitant rapidité des réflexes, adresse et précision. C'est le cas aux USA dans le basket et le baseball et dans les pays scandinaves pour les épreuves de ski alpin. Cette pratique existe maintenant en France dans le ski alpin et se répand chez les adolescents des vallées alpines.
4 - Aide thérapeutique dans certains troubles neuropsychiques
Dans le syndrome d’hyperactivité avec troubles de l'attention qui peut persister chez les jeunes adultes, le trouble attentionnel et l'impulsivité peuvent être nettement améliorés par la prise de nicotine. Dans la maladie de Parkinson, la nicotine a pu exercer une action favorable complémentaire pour les contractions musculaires et le tremblement. De même dans la maladie d'Alzeihmer, la nicotine peut améliorer transitoirement la mémoire à court terme.
5 - Recherche de nouvelles applications thérapeutiques
Le rôle de la nicotine sur les fonctions cognitives a pu être étudié avec des souris mutantes privées de récepteurs nicotiniques (beta-2) à l’acétylcholine ; ces souris perdent alors la possibilité d'apprentissage, de mémorisation et d'adaptation comportementale. Ceci incite à envisager des perspectives thérapeutiques à la nicotine ou aux agonistes nicotiniques dans certaines affections neurodégénératives et certains troubles psychologiques.
En conclusion, tous ces effets doivent être reconnus, évalués et pris en charge tout au cours du processus de cessation du tabagisme. Redevenir non fumeur résulte d'un apprentissage.
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