Le 5/7 de France Inter animé par Dorothée Barba a invité le Docteur Dominique Dupagne (DDD) à commenter l’actualité. La fin de l’interview a porté sur la cigarette électronique : en voici la transcription (à partir de la 12ème minute).

France Inter le 11/07/2013, podcast http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=677802
Dominique Dupagne, les auditeurs de La Tête au Carré sur France Inter vous connaissent bien car vous participez régulièrement à l'émission Les Grosses Têtes au Carré de Mathieu Vidard et votre intervention récemment sur la cigarette électronique avait fait beaucoup réagir.
J'aimerais qu'on revienne sur ce sujet qui concerne beaucoup de monde. Il y aurait 500 000 à 1 000 000 de vapoteurs en France, les chiffres ne sont pas très précis sur ce terrain là, le marché explose. Vous vous êtes longtemps battu contre cette cigarette électronique et finalement vous dites aux fumeurs : “Allez y, la cigarette électronique c'est pas dangereux, et c'est même une excellente manière d'arrêter de fumer”. Vous avez complètement changé d'avis.
Docteur Dominique Dupagne (DDD)- En fait, j'ai un forum sur l'arrêt du tabac qui était pollué par ce qu'on appelle des spammeurs, des gens qui voulaient faire de la publicité pour des cigarettes électroniques il y a quelques années, et ça m'irritait profondément.
Ça vous agaçait…
DDD- Voilà. Donc je me battais en disant “On ne sait pas trop ce qu'il y a dans votre truc” ; à l'époque c'était encore assez expérimental et donc j'étais assez remonté contre ces gens-là. Et puis il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis. Quand j'ai constaté que c'était à mon sens un des principaux progrès en terme sanitaire du début du 21ème siècle, je me suis dit : il faut absolument défendre ce produit. Je ne suis pas le seul, il y a d'autres acteurs sanitaires qui sont très favorables à ce produit.
On a des experts qui inventent des risques fumeux - si vous me permettez ce jeu de mots - sur ce produit alors que ça contient des composants qui sont utilisés dans l'industrie alimentaire, dans les médicaments, dans les fumigènes de salles de spectacle, depuis des années...
Ce que vous répondent les opposants quand même c'est que l’innocuité n'a pas réellement été prouvée encore.
DDD- Oui, on a pas à prouver l'innocuité du thé à la menthe si vous voulez.. Quand on chauffe...
Là on parle d'un substitut au tabac c'est différent.
DDD- Non, on ne parle pas d'un substitut au tabac.
D'une manière d'arrêter de fumer en tout cas.
DDD- Non, non ! D'ailleurs ils sont très prudents, les gens qui font des cigarettes électroniques parlent d'un gadget amusant pour faire de la fumée. Maintenant, qu'on l'utilise pour mettre des cartouches à la nicotine...
Ça ressemble fortement à une cigarette quand même !
DDD- Bien sûr, les cigarettes en chocolat aussi ça ressemblait à des cigarettes si vous voulez... Qu'on l'utilise en sevrage tabagique, c'est sûrement une très bonne idée, mais ils ont la prudence pour ne pas se faire accuser justement de faire de la publicité pharmaceutique illégale, de ne pas prétendre que c'est un... Ils n'ont pas de revendication thérapeutique.
C'est un produit qui a un statut alimentaire. Je veux dire : pas très différent d'un diffuseur d'huiles essentielles que vous avez chez vous. C'est simplement qu'il y a une petite chaufferette électrique...
Alors, statut alimentaire justement, la Commission Européenne n'est pas de cet avis : une commission vient de rendre un avis qui indique que la cigarette électronique doit être rangée parmi les médicaments finalement parce qu'elle doit être vendue en pharmacie ; revoilà les pharmaciens...
DDD- L'immense succès de la cigarette électronique dérange énormément de gens, ce qui est assez troublant encore une fois, pour quelque chose qui est un problème sanitaire majeur.
Le marché est considérable, il faut le rappeler.
DDD- Vous avez les autorités qui voient des recettes fiscales potentielles s'en aller ; vous avez un marché pharmaceutique qui s'est un peu vautré en croyant la nicotine exclusive sous forme de patch ou de spray, et qui ne marche pas vraiment ; vous avez des experts qui étaient un petit peu accrochés à l'industrie pharmaceutique et qui voient un concurrent arriver. Tout ça est assez malsain et je trouve ça fascinant de voir les levées de bouclier de gens qui sont là normalement pour défendre la santé publique, contre un des produits les plus efficaces pour lutter contre l'un des plus grands fléaux nationaux et mondiaux en terme de santé publique. C'est assez impressionnant. Donc on essaye de couper la tête de la cigarette électronique. Je vous rassure, ce n'est pas possible, c'est impossible, c'est trop facile à dissimuler, c'est trop facile à importer en contrebande. Donc, tout ce que peuvent faire les autorités, c'est contraindre les gens à l'acheter sur un marché parallèle.
Interdire aux mineurs également...
DDD- Il aurai été beaucoup plus simple de donner des contrainte en terme de qualité de fabrication, de marquage CE, de vérifier vraiment la composition ; mais mettre ça comme un produit pharmaceutique, ça n'a aucun sens.
Donc vous êtes pour les boutiques de e-cigarette qui fleurissent comme des champignons ?
DDD- On ne peut rien contre ces gens là, si vous voulez, c'est un mouvement de fond, un mouvement 2.0, c'est quelque chose qui est sorti du marché et non pas de la science, de l'Université. On va voir d'une façon intéressante qu'on ne peut pas empêcher ce marché.
Est-ce-qu'il n' y a pas, quand même un risque, Dominique Dupagne, que les non-fumeurs se mettent à vapoter par effet de mode et que ça crée un produit d'appel vers la cigarette ?
DDD- Clairement non. C'est pareil, c'est un mythe. Bien sûr qu'il y a des gamins qui ont essayé de tirer sur des cigarettes électroniques avec des cartouches aromatisées ou sans nicotine.
De toutes façons, dans les rares cas où c'est arrivé, on n'a jamais vu quelqu’un devenir accro à la cigarette électronique. On peut être accro à la cigarette fumée de tabac mais la cigarette électronique a une cinétique différente et on n'a pas de gens qui ont commencé et qui n'ont pas pu s'arrêter, ça n'existe pas.
Il faut peut-être rappeler, pour conclure, Dominique Dupagne, que vous n'avez aucun intérêt commercial dans cet affaire.
DDD- Oui, c'est bien de le dire, je n'ai aucun intérêt avec aucun des sujets que j'ai abordés aujourd'hui. C'est important de le dire parce qu'on pourrait croire que je défends tout ça ou je défends les pharmaciens parce que j'ai des actions chez eux. Je suis totalement indépendant de tout ça.
Et vous n'êtes pas vendeur de e-cigarette.
DDD- Non plus !
Vous vapotez, par contre ?
DDD- Non. J'ai arrêté de fumer il y a dix ans et si je devais arrêter maintenant je vapoterais très certainement.
Merci beaucoup Dominique Dupagne, médecin, blogueur. Je renvoie les auditeurs à votre site internet Atoute.org.
Source et commentaires
J'en ai remis une couche sur France-Inter, transcription de Patachoux et Stinger (merci à eux).