Les femmes enceintes sont particulièrement motivées pour cesser de fumer : elles connaissent les risques accrus que le tabagisme entraine pour leur futur bébé. Ce n'est pas un problème de motivation mais il reste malheureusement toujours à leur proposer une aide efficace : confirmant l'étude SNAP de 2012 [1], une étude française SNIPP étude conclut que la substitution nicotinique est sans efficacité chez la femme enceinte fumeuse [2].
Les timbres de nicotine démontrés sans efficacité pour aider à l'arrêt du tabac
Lors du colloque à l'occasion de la Journée mondiale sans tabac le 28 mai 2013, Ivan Berlin (pharmacologue à l'Hôpital Pitié-Salpêtrière et ancien président de la Société Française de Tabacologie) a présenté les résultats de l’étude SNIPP sur l’évaluation du timbre nicotinique chez la femme enceinte fumeuse.
L’étude a porté sur 402 fumeuses enceintes fumant au moins 5 cigarettes par jour. La moitié des futures mamans avaient un taux de cotinine salivaire important et fumaient entre 10 et 20 cigarettes par jour. Elles ont été mises sous traitement nicotinique quinze jours après la signature de leur consentement à participer à l’étude.
Les fumeuses ont appliqué à partir de la fin du premier trimestre de grossesse et jusqu’à l’accouchement soit,
- un timbre nicotinique (199 femmes) soit,
- un timbre placebo identique (203 femmes).
Les doses administrées ont été ont été évaluées au cas par cas et prescrites en fonction du taux de cotinine salivaire. La dose en nicotine variait entre 10 et 30 mg par jour avec une dose moyenne de 18 mg. La dose annoncée dans le groupe contrôle (timbre placebo) était majorée. Le taux d’observance pour les deux groupes était élevé : environ 75 %.
Le critère principal d’efficacité de l’évaluation était l’abstinence complète et continue depuis la date d’arrêt prédéfinie. Au total seulement 5 % (21 femmes) se sont abstenu de fumer durant le traitement :
- 11 dans le groupe nicotine comparé à
- 10 dans le groupe placebo.
Dans les deux groupes :
- l’abstinence ponctuelle a été extrêmement faible (environ 10 %),
- la baisse de la consommation de cigarettes est identique.
L’étude SNIPP a montré que malgré
- une durée d’exposition longue,
- des doses de nicotine adaptées individuellement,
- des doses moyennes plus élevées (par rapport à d’autres études) et,
- une observance satisfaisante,
le timbre de nicotine n’augmente statistiquement ni le pourcentage d’arrêt du tabac ni le poids de naissance des enfants.
Comment cela est-ce compatible avec la doxa sur l'efficacité des patchs ?
Compte tenu qu'il ne doit pas y avoir de différence physiologique significative entre une femme enceinte et une femme non gravide à propos du tabagisme, cette étude révèle l'inefficacité des patchs de nicotine chez les femmes de moins de 40 ans, chez toutes ces femmes. Ce que d'aucuns connaissent depuis longtemps.
Comment cela est-ce compatible avec la doxa sur l'efficacité des patchs? Simplement en remarquant que l'échantillon ici est représentatif de femmes dans la vraie vie, non sélectionnées suivant des critères ad hoc dans des expériences cliniques par des labos intéressés. Les expériences cliniques ne sont JAMAIS représentatives des publics fumeurs de la vraie vie : c'est juste théorique et une perte de chance pour les fumeuses concernées !
[Mise à jour 12.03.2014]
L'étude a été publiée (en accès libre) dans le BMJ, cf. Les patchs de nicotine ne gagnent pas le match, même durant la grossesse (ter)
Références
- Même durant une grossesse, les patchs ne gagnent pas le match
- Essai thérapeutique de l’efficacité du timbre nicotinique chez la femme enceinte fumeuse, RESPAD, 28.05.2013
Note
Lors de la table ronde "Jeunes et tabac" de cette manifestation au Ministère de la Santé, Pierre Arwidson, Directeur des affaires scientifiques de l'INPES a présenté le projet Hutchinson d’aide à l’arrêt du tabagisme par des lycéens. La conclusion est que les programmes d’aide à l’arrêt du tabagisme des lycéens par des lycéens sont efficaces, à la différence de l’intérêt des aides pharmaceutiques, qui lui n’a pas été prouvé.
Il n'y aurait pas comme un 'bug' dans la communication des institutions sur les aides à l'arrêt du tabac ? Il n'y aurait pas comme une erreur de programmation en subventionnant des dépenses qui ne servent à rien : 50 € par an en palliatifs nicotiniques et même 150 € pour les femmes enceintes... De qui se moque t-on ?
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